Pendant quelques minutes j'ai presque été soulagée. C'était plus simple. Après tout c'était la feuille de route, non ? Simple.

Et puis dans l'heure qui a suivi, c'est monté, inexorablement. La douleur. Le cri sourd au fond de mes tripes.

C'est tellement, tellement dur, de faire ce qui est "bien" (définis "bien") plutôt que ce dont on a envie.

Bien, parce que tu ne va pas mettre ta vie à risque pour moi. Je n'ai jamais eu le choix qu'entre un fauteuil en friendzone et un siège éjectable, en somme.

Bien, parce que je ne suis pas sûre d'être en état de gérer du compliqué-triste. Du compliqué-joyeux, oui. Du triste j'en ai soupé, ces dernières années, j'ai besoin de refabriquer des forces.

J'ai été en colère, un peu, contre toi, parce que tu jouais avec un feu que tu ne sais pas éteindre. Parce que non, je ne crois pas que tu serais prêt à y faire face. Tu as pris acte ? Ou trouvé ta limite, toi aussi ? Ca me donne raison. Comme si ça me consolait de quoi que ce soit.

Je suis en colère contre moi, maintenant, parce que ça me manque déjà, que tu ne saches pas complètement te tenir.

Parce qu'en fait d'attendre que tu me brises le cœur, je m'en suis occupée toute seule. Haché menu, salé, du vinaigre sur la plaie. 

Ca fait mal pareil, finalement. Pire peut-être : je n'ai que moi à blâmer pour cette douleur.

Putain de concordances des temps...

Il n'y a pas grand monde qui m'a fait l'effet que tu me fais. Il n'y a pas tant de fois où j'ai eu l'impression de ne pas être seule de mon espèce sur cette planète. (Merci pour ça).

Et oui, tout le reste est à nous. On va rire, on va se passionner, on va parler jusqu'à la fin du monde. On va en passer, de jolis moments. Je vais appeler Spinoza à la rescousse, encore : apprendre à être emplie de joie par ta simple existence. Sans rien attendre, jamais, sans rien espérer. Ca va juste me prendre une éternité. Une longue éternité.

De toute façon, ça n'a jamais existé vraiment, la possibilité de toi. C'était dans un coin de ma tête et au bout de tes doigts, pas plus qu'une brève tentation, non ? 

J'écoute toute la musique triste à pleurer du monde pour avoir une raison de laisser les larmes couler. C'est un peu con de pleurer sur une histoire qui n'a jamais existé, quand même. Pauvre meuf. (Si j'ai tort et que tu ne te précipites pas pour me le dire, tu es un homme mort.)