Il est surprenant de se rendre compte que des personnes nous accompagnent tout au long de notre vie et qu’on ne les voit pas, on en parle pas. Ils sont là en filigrane. J’ai rencontré C. mon premier jour au fast-food, nous avions été embauchés ensemble en juin 1997, l’année de nos 20 ans. Je pense qu’il est tombé amoureux de moi très vite, si ce n’est dès ce jour-là. Cela peut paraître prétentieux de ma part de dire ça et pourtant, s’il y a une chose dont je suis sûre c’est que cet homme a été amoureux de moi, sans doute beaucoup plus sincèrement et intensément que la plupart de ceux qui ont fini dans mon lit. Et moi ? Ben non. Pourtant c’était un beau jeune homme, d’une grande douceur et d’une gentillesse sans limite mais les sentiments ne s’expliquent pas. Il y avait comme un effet miroir, la même enfance, les même blessures, les mêmes failles… j’avais pas envie d’un alter ego. C’était tellement mieux de s’amouracher de celui qui me parle mal, me traite comme une merde et m’explique qu’il est vraiment impossible d’être amoureux de moi. Et quand j’étais plus bas que terre, il y avait toujours les bras de C. pour me consoler, sécher mes larmes, ses mots pour panser mes maux et ses lèvres qui tentaient parfois de trouver les miennes qui se dérobaient toujours.
Pendant deux ans, il a été mon ange gardien lors des soirées trop arrosées où je dérivais totalement. Il avait toujours un œil sur moi, contrairement à mon petit ami qui occupait son temps à en draguer d'autres, s’assurait que je ne me mettais pas en danger et quand c’était le cas, intervenait systématiquement. Comme cette fois où ivre à ne plus réussir à me tenir debout, j’ai suivi deux mecs qui m’ont fourguée dans leur voiture pour m’amener où ? Faire quoi ? (j’ai ma petite idée) Il m’a sorti de la voiture et se serait battu avec les deux individus si besoin. Pendant que l’officiel dansait et ne s’était pas rendu compte de mon absence.
Et puis, il a rencontré une fille qui voulait tout de suite des enfants. Elle avait 19 ans, lui 22 et les voilà à la veille de leur mariage, elle enceinte, lui à son enterrement de vie de garçon et moi de sortie avec mes copines. Par un concours de circonstances, on se retrouve dans la même boîte, je sors prendre l’air, il me rejoint, livide, en larmes (et alcoolisé) et me dit tout ce qu’il ressent pour moi et l’erreur qu’il est en train de commettre. Je le convaincs que c’est seulement le stress du mariage et la venue d’un bébé mais qu’il est vraiment amoureux de sa future et pas de moi. Il me demande alors de lui accorder le baiser que je lui ai toujours refusé.
Comment dire ? Le souvenir de ce baiser, 25 ans plus tard, est toujours aussi brûlant. On m’a rarement embrassée comme ça… jamais ? Peut-être deux fois, pas plus. Un seul et unique baiser, puis son mariage, deux enfants, son divorce deux ans plus tard et on se perd de vue. Chacun sa vie, pendant une petite dizaine d’années, quelques nouvelles par le biais d’un ami commun. Puis facebook en 2009, il m’ajoute en ami, me dit qu’il est tellement heureux de me retrouver, qu’il a toujours pensé à moi. J’avoue que moi, non. On s’échange des banalités, il finit tous ses messages par « je t’embrasse » (tu penses !) et les années passent, nouvels ans et anniversaires, des nouvelles, des propositions qu’on se voit, moi qui refuse, on habite trop loin etc. La vie qui passe, il se remarie peut-être deux fois, a d’autres enfants, me dit qu’il est heureux. Moi, je patauge lui fait croire que tout va bien.
Cette année, j’ai oublié son anniversaire, lui en vacances à Londres a pensé à moi et m’a envoyé une photo... toujours ce décalage. Pour mon anniversaire, je me rends compte à 20h qu’il ne me l’a pas souhaité, j’ai un pincement au cœur. A 20h18 son message, il me dit qu’il n’a pas l’impression que 25 ans se sont écoulés depuis notre rencontre (27 en fait). On se remémore cette époque, je le remercie d’avoir été mon ange gardien. Il me répond « mais entre toi et moi, c’est une grande histoire » Je lui réponds « une grande histoire de 27 ans » et depuis silence.
Une grande histoire en filigrane qui continuera de s’écrire au nouvel an maintenant.
Je me dis qu'elle méritait peut-être d’être écrite en lettres d’imprimerie cette histoire mais ainsi va la vie et il est heureux. L'aurait-il été avec moi ?
Ahlalala mais oui, sans doute, NP. Il y a plusieurs façons d'être heureux.
Tu dis "j’avais pas envie d’un alter ego", c'est rigolo, j'ai très très très longtemps pensé ça. Jusqu'à ce que je me dise que quelqu'un qui comprend et aime qui tu es sans que tu doives passer ton temps à expliquer pourquoi, comment... enfin bref, je n'en suis plus sûre. Juste, un alter ego suffisamment distinct.
Tu crois que tu te sentirais de le revoir (innocemment, même si moi aussi j'ai ma petite idée) ?
Je me suis posée la question mais ça serait un peu égoïste de ma part, non ?
Et pour l'alter ego, je reste mitigée. Mais ça serait toujours mieux que les choix que j'ai pu faire.😅
Ah ça. Pas mieux, sister NP, pas mieux.
Bon, finalement je lui ai proposé qu'on se revoit autour d'un café. Ça lui ferait un immense plaisir. À suivre 😂
Avec les pouvoirs de ce blog, ouhlala, ça peut mener à tout, NP !