Parmi les hippopotames qui ont traversé ma vie, il y en a quelques-uns, vraiment peu, mais quand même, pour qui j'ai (eu) de grandes indulgences. Sans doutes ceux qui ont eu l'air d'apprécier ce que je croyais être le moins aimable ? Bons comédiens ? Plus malins que les autres ? Va savoir ?

Je crois que ce sont les pires, ces hippopotames qui auraient presque pu être des vrais grandes rencontres.

Ils font pétiller la vie, lâchent de loin en loin des mots doux qui font rêver un peu, effleurent un peu de peau, si peu, on croirait avoir rêvé.

Et puis ces cons-là, ils se mettent à réfléchir. A-t-on jamais vu ça, un mec qui réfléchit, et à quelle genre de catastrophe ça peut bien mener ?

Alors mêmes qu'ils s'étaient doucement emparés d'un bout de nous, comme une main qu'on saisit en douce à l'abri des regards, ils la lâchent, cette main, comme s'ils avaient à nouveau besoin de la leur, et ne la redonnent pas. Les mots s'estompent, le rêve s'achète brutalement.

Bref, ils se souviennent que les hippopotames, comme les crocodiles, leurs potes (ou pas ?), ont une grande gueule et de petit bras.

Et voilà. On a plus qu'à panser ses plaies tant qu'on peut, jurer qu'on ne s'y laissera plus prendre. Savoir que c'est faux.

"Oui, je sais très bien, depuis longtemps, que j'ai un cœur déraisonnable, mais, de le savoir, ça ne m'arrête pas du tout." (Colette)

Sans doute il serait temps de s'assagir, au moins un peu.